Les désordres de notre société sont devenus si brûlants depuis trente ans, que la loi a institué suivant la volonté de M. Badinter une forme d’indemnisation garantie au moyen d’une caisse alimentée par un prélèvement sur les primes d’assurances.

Ainsi, dès la condamnation de son agresseur à lui verser une somme en réparation, la victime d’un dommage corporel ou bien ses proches constitués en partie civile reçoivent du Fonds de Garantie des Victimes du Terrorisme et autres Infractions l’intégralité des dommages et intérêts en complément des provisions qu’il peut lui avoir accordées.

Charge reviendra à la personne civilement condamnée de rembourser le FGTI.

Le procès d’assises qui se déroule à cet instant et concerne Jean-Michel BISSONNET laisse paraître insidieusement quelque dérive que pourrait occasionner ce généreux système en ce qu’il laisserait croire ou entendre qu’il « suffit de se servir », puisque tombent instantanément les mannes généreuses de l’État protecteur et du produit des assurances.

On ne cesse d’être surpris de la conduite de l’enquête à travers les bribes qui en sont retranscrites. M. BISSONNET a le tort d’être riche, d’avoir amassé de l’argent, user d’effets de grandiloquence et de fréquenter depuis si longtemps un aristocrate désargenté, enlacé à sa propre déchéance. De retour d’une soirée au Rotary, il découvre le corps ensanglanté de sa femme et téléphone aussitôt aux secours, affolé, dans une sorte d’hystérie qui ne semble pas feinte. Lors des investigations pourtant, il est peu après accusé d’avoir commandité le crime, puis bientôt emprisonné par un juge d’instruction sévère. Le vicomte qui lui réclamait de l’argent peu de temps auparavant avoue avoir caché l’arme et le jardinier, qui lui en réclamait également pour s’acheter une voiture,  s’épanche avec une grande condescendance, contraint d’avouer d’être le tireur parce que le recul de l’arme a arraché son ongle.
Il vient affirmer que c’est à la demande de M. BISSONNET qu’il a occis sa femme, ajoutant qu’il avait tant d’admiration pour lui qu’il aurait tué n’importe qui pour lui être agréable. C’est un homme charmant – et crédible…

M. BISSONNET usant d’un machiavélisme outré, aurait caché au jardinier jusqu’à la dernière seconde le nom de la personne à faire disparaître, ayant en lui cette foi aveugle et incandescente. Il n’aurait pas pris la précaution d’aller quérir des tueurs à gage expérimentés et d’organiser le crime en dehors de chez lui, lui qui avait pourtant les moyens financiers d’une autre mise-en-scène. Voulait-il avoir ce plaisir de découvrir lui-même le résultat d’un si paisible meurtre, ce que ne font jamais les commanditaires pour ne pas se salir les mains en traînant une serpillère autour du corps ?

Il aurait réuni le jour même du crime, dans une sorte de curieuse improvisation, ces deux pieds nickelés de la gachette, l’aristocrate de 89 ans et le jardinier lesquels, selon l’enquête, ne se connaissaient pas, mais avaient cependant le même intérêt vis-à-vis de leur bienfaiteur qui leur aurait promis monts et merveilles en échange du crime, pourtant après avoir refusé de leur prêter de l’argent quelques jours auparavant, tandis qu’on affirme qu’il fomentait cet agissement depuis des mois selon les dires du jardinier maladroit.

Un scénario de cette nature, aucun producteur soucieux de la rentabilité des films qu’il fabrique n’en voudrait, tant il est dénué de sens.

Et l’histoire est clairement limpide en vérité : ces deux personnes se sont entendues pour cambrioler la demeure de M. BISSONNET et s’emparer de l’argent liquide qui s’y trouvait. Mais le cambrioleur maladroit a tiré un premier coup lorsque Mme BISSONNET est apparue, s’estropiant le doigt et la blessant grièvement puis le vieux chasseur a repris l’arme pour achever la compagne de son « ami » comme on le fait lors des chasses – le jardinier devenu infirme étant cette fois incapable de tirer le second coup. Au vu de la tournure tragique qu’avait pris l’aventure, ils ont renoncé au butin.

Cela est pourtant trop simple pour une institution judiciaire tout autant jésuite que totalitaire.

Et pour masquer d’une aura de vraisemblance une accusation qui ne tient pas,  les audiences de la Cour d’assises s’attachent au détail de façon maladive, guettant en vain le moindre signe qui corroborerait ce montage impossible, usant du fait qu’il n’a jamais été recherché véritablement si les deux compères d’un jour ne s’étaient pas rencontrés dans les mois qui précédaient. Elles n’abordent jamais la question principale ; celle de mesurer que pour tuer sa compagne avec qui on a partagé sa vie durant 30 ans, qui plus est la mère de ses deux enfants, il faut un motif ; ou bien être pétri d’une haine indicible.

Or donc, les enquêteurs n’ont rien trouvé de cette nature, M. BISSONNET n’avait nul besoin d’argent, ni ne haïssait sa femme. Qu’importe, M. BISSONNET, comme M. DEPERROIS est maintenu en détention provisoire, dont on espère qu’elle provoquera chez lui suffisamment de désordre qu’elle motivera la perte de sa raison. Ce qui ne manque pas de se produire.

L’affaire de Daniel MASSÉ se réunit à celle de M. BISSONNET, par le rôle que ne va pas manquer de jouer le FGTI. Dans un cas, il s’est trouvé que le condamné a perdu la faculté d’user de la cassation pour faire valoir que la somme allouée (près de huit cent mille euros) ne correspondait en rien à ses revenus, ceci de par l’incompréhensible impéritie de son avocat, Maître Jean-Luc Forget, aujourd’hui Président de la Conférence des Bâtonniers (sic) qui a  malencontreusement « oublié » de contester les expertises et de se pourvoir en cassation !

Dans un autre, on usera avec justesse du fait que ses revenus peuvent motiver de lourds dommages et intérêts. Et le FGTI, dès la condamnation devenue définitive s’acquittera de la somme allouée et la distribuera.

Ainsi, à imaginer que la vérité ait pu surgir autrefois dans l’affaire Daniel MASSÉ, le crime ayant trait à un différend à l’intérieur même de la famille des accusateurs dont le but était en vérité de se spolier entre eux, les dommages et intérêts se seraient évanouis ou bien auraient beaucoup perdu en importance. M. MASSÉ était étranger à cette famille sinon qu’il les avait aidés à monter l’entreprise que le mari possédait pour 90 parts sur 100, aussi l’institution judiciaire avait la faculté de faire peser sur ses épaules tout le poids de la générosité de l’État.

Il en ira de même pour M. BISSONNET, l’état de sa fortune et de son train de vie autorise toutes les largesses, au contraire d’un comte ou d’un baron désargenté, et d’un homme à tout faire. C’est de cela même dont il fut question pour Edwige ALESSANDRI, l’avantage qu’elle détient sur les cambrioleurs de hasard qui ont vraisemblablement tué son compagnon, ce sont ses revenus. Il était dés lors hors de question qu’elle puisse être acquittée et la cassation du premier procès d’appel n’autorisait plus que la condamnation civile puisse être remise en cause.

Comble de l’ironie, le juge d’application des peines refusera une conditionnelle en prétextant que le remboursement des dommages et intérêts fut trop aisé. En vérité, il s’agissait surtout de se mettre en ordre pour barrer la route à toute révision, puisque l’on venait de découvrir l’identité de possibles cambrioleurs qui se seraient introduits dans la maison le soir du crime.

Ainsi, pour se garder de telles tentations, faudrait-il instituer que le FGTI ne délivre de telles largesses qu’à pas comptés, et que ces sommes ne peuvent en aucune manière servir à régler les honoraires des auxiliaires de justice.

Aujourd’hui, si l’Institution judiciaire refuse avec une constance implacable de procéder à l’annulation de la condamnation de Daniel MASSÉ, c’est bien que la somme qui se trouve en jeu, sans compter les dommages et intérêts dont l’État devrait s’acquitter en pareilles circonstances – et c’est toute la famille qu’il faut indemniser, lui semble à elle-même insupportable. Aussi maintient-elle à toute force l’erreur, comme elle le fera pour Edwige ALESSANDRI, autant qu’elle le pourra, malgré les évidences ou les preuves irréfutables qui lui seront présentées.

 

Chapitre 17

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