64 – Insider podcast / 1000 degrés entoure Daniel Massé d’un voile de confusion pour mieux estomper l’action de son Comité de soutien et l’affrontement avec l’Institution judiciaire

Les réformes qu’il convient d’apporter :
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Une erreur judiciaire ordinaire par Yannick Massé
L’instruction qu’elle est censée engager par la suite est réduite puisqu’elle ne s’accompagne pas d’une indépendance de la conduite des investigations et des moyens qui en découlent par rapport à la juridiction de jugement et que rien n’est garanti quant à l’accès du requérant à son dossier et à la possibilité pour lui de formuler des demandes.
Les causes d’erreurs judiciaires
À la source de l’erreur judiciaire se trouvent presque toujours deux causes principales et quelques causes adjacentes :
Le parti pris se reconnaît à ce que l’on constate que les pièces du puzzle ne s’emboîtent pas : le système des charges recèle des manques et des oublis, des impossibilités et des incohérences, parfois flagrantes.
Pour maintenir l’accusation, l’institution pratique alors l’occultation d’une partie du dossier.
La révision consistera à mettre en lumière la partie du dossier qui se trouvait de ce fait inaperçue.
Il se livre alors un bras de fer avec l’institution judiciaire car il est tenté par tous moyens d’annihiler la révélation de la partie occultée sous le prétexte fallacieux qu’elle faisait tout de même partie du dossier, à tel ou tel titre. La décision d’irrecevabilité de la deuxième requête formée par M. Massé en est un archétype.
C’est souvent par ce biais que des requêtes qui auraient dû trouver une issue favorable sont rejetées sans possibilité de recours.
La Cour Européenne de sauvegarde des droits de l’homme a rejeté la requête formulée par M. Massé, cependant, la question demeure, lancinante : qu’en est-il véritablement du respect de l’article 6-1 de la Convention, du respect de l’article 13 et du droit au procès équitable en matière de révision ?
Il en résulte de la même façon que M. Massé se trouve pour l’heure livré à l’arbitraire.
M. Daniel Massé a saisi la Cour européenne des droits de l’homme et l’on est frappé de ce que le refus de motiver la décision d’irrecevabilité de la requête en violation de la législation interne, le refus de pratiquer les investigations qu’il a demandées sans aucun motif, toujours en violation de la loi interne, caractérisent sans contestation possible la violation de l’article 6-1 de la Convention.
La réponse de la Commission de révision sera des plus diligentes et consiste à prendre de vitesse la publication du Journal Officiel.
En effet la disposition législative sur laquelle elle s’appuie pour refuser la transmission de cette question prioritaire à la Cour de cassation, en l’occurrence l’article 23-6, est supprimée quinze jours après le rendu de sa décision par la promulgation de la loi réformant le Conseil Supérieur de la Magistrature.
Car bien évidemment la question posée par M. Massé nous semble particulièrement sérieuse et n’a jamais été soumise à l’examen du Conseil constitutionnel, ce qui n’est pas contestable.
Or la solution proposée par la Commission consiste à relever que la question doit être transmise directement au Premier Président de la Cour de cassation comme en dispose l’article 23-6 promis à suppression. Ce qui est rigoureusement impossible puisqu’elle doit être examinée auparavant par la Commission et jointe à la procédure.
Ainsi, la réponse négative quant à la transmission de la question de constitutionnalité de la Commission de révision est celle des schizophrènes : je ne juge pas et je n’existe pas.
Autrement dit, au cas où l’on adresse la question prioritaire au Premier Président, l’on respecte l’article 23-6 mais l’on transgresse l’article 23-2 et la question est rejetée ; au cas où l’on adresse la question prioritaire par écrit motivé et séparé en la joignant à la requête comme M. Massé a cru bon de faire, on respecte l’article 23-2 mais l’on transgresse l’article 23-6 et la question est rejetée.
M. Massé doit en déduire que la question ne sera pas posée.
La commission de révision se trouve contrainte par la nécessité de préserver l’ordre institutionnel de maintenir un innocent en prison pour de nombreuses années, quitte à s’affranchir du respect scrupuleux de la loi.
La requête comporte plus de deux cents cinquante pages d’arguments, expose le plus clairement possible deux faits nouveaux et six éléments inconnus, il s’en déduit les questions qui se posent concernant les relations familiales entre les victimes notamment et qu’il conviendrait de résoudre par des commissions rogatoires simples.
LA REQUÊTE EN RÉVISION DÉPOSÉE PAR M. MASSÉ EST ACCESSIBLE EN SUIVANT CE LIEN
Annexe 1 / Annexe 2 / Annexe 3 / Annexe 4 / Annexe 5 / Annexe 6 / Annexe 7 / Annexe 7bis /Annexe 8 / Annexe 8bis / Annexe 9 / Annexe 10 / Annexe 11 / Annexe 12 / Annexe 13 / Annexe 14 / Annexe 15 / Annexe 16 / Annexe 17 / Annexe 17bis / Annexe 18 / Annexe 19 / Annexe 20 / Annexe 21 / Annexe 22 / Annexe 23 / Annexe 24 / Annexe 25 / Annexe 26 / Annexe 27 / Annexe 28 / Annexe 29 / Annexe 30 / Annexe 31 / Annexe 32 / Annexe 33 / Annexe 34
La réponse de la Commission consiste à justement ne jamais rien répondre puis à refuser toutes les demandes d’investigations simples que M. Massé a formulées explicitement dans un courrier :
La commission de révision se garde de conduire les démonstrations inverses et se trouve placée dans l’incapacité de répondre.
La commission de révision prend soin de ne pas avoir à minimiser ce fait nouveau et se trouve placée dans l’incapacité de répondre.
La commission de révision ne se hasarde pas à estimer le degré de gravité d’une telle situation et se trouve placée dans l’incapacité de répondre.
Etc.
La rédaction d’un mémoire
Nous joignons en pièce annexe le résumé de la réfutation des charges d’accusation et les faits nouveaux et éléments inconnus qui figuraient dans la première des deux requêtes en révision que M. Massé a déposées. Il est issu pour une grande part du mémoire rédigé par le Comité. Nous avions proposé à M. Massé de diviser l’argumentation en trois parties :
En réalité le fait principal semble une redite à l’affaire d’Outreau. Il nous apparaît que le magistrat instructeur est devenu quelque peu otage de la partie civile. Nous découvrons que le père et beau-père des victimes s’est investi de conduire l’enquête ;
Qu’il oriente les investigations avec l’assentiment des enquêteurs et l’institution qui agit à sa suite même si les incriminations qu’il formule sont dépourvues de réalité, et ceci en faisant montre d’un certain manque de recul.
Lorsqu’il s’exprime, les enquêteurs ou le juge obtempèrent à plus ou moins longue échéance. Nous sommes particulièrement frappés par cette sorte de dévotion dont on fait preuve à son égard : c’est lui qui apporte les éléments incriminant M. Massé et qui les commente, avec une froideur et un détachement troubles.
L’entreprise Médilens a changé de main au moment de l’attentat, élément totalement ignoré des jurés et de la Cour.
La première interrogation qui ressort du dossier est celle-ci : comment se fait-il que ni les magistrats, ni le parquet, ni les avocats n’aient songé à se poser cette simple question : connaître les personnes qui détenaient la propriété de l’entreprise Médilens. C’est le Comité de soutien qui demande pour la première fois au greffe du tribunal de commerce de Toulouse de lui fournir les statuts et les procès-verbaux d’assemblée relatifs à cette entreprise.
Et c’est ainsi que nous mettons à jour que Médilens a changé de mains au moment même de l’attentat, savoir à quelques semaines d’intervalle. M. Joseph Hernandez qui possédait 90 % des parts avant d’être grièvement blessé, n’en détient plus ensuite que 30 % en janvier 1995, sans qu’il n’ait apposé une quelconque signature sur le procès-verbal qui l’entérine.
Autrement dit, son beau-père l’a spolié de 60 % des parts alors que quelques temps plus tôt, le malheureux gendre se refusait à en céder 12 % en une seule fois à M. Massé pour contrepartie de lui avoir fourni l’essentiel de l’outil de production – encore acceptait-il de le faire sur une période de trois ans à la condition que M. Massé devienne permanent bénévole.
La constitution du Comité du soutien
Nous avons pris soin de lui rappeler cependant qu’une étude de cette nature est longue, souvent fastidieuse et infructueuse, qu’elle nécessite beaucoup de prudence, de temps et de circonspection.
Au stade où nous abordons l’étude des pièces, il ne reste désormais à la disposition de M. Massé que la procédure en révision et l’on ne peut savoir s’il sera possible de trouver un élément inconnu de la juridiction au jour du procès ou un fait nouveau, la consistance des dossiers étant absolument différente d’une affaire à l’autre. Nous mettons également en garde M. Yannick Massé de ce que la procédure a toutefois peu de chance d’aboutir car la Commission et la Cour de révision ont pour notoriété de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour trouver un motif de ne pas atteindre à l’autorité de la chose jugée.
Nous indiquons de même, suivant l’expérience que nous avons acquise, notamment lors de la présidence du comité Deperrois, qu’il est inutile de contacter un conseil sans avoir préparé minutieusement le dossier de révision et qu’il reviendra au dit Comité de trouver les faits nouveaux et éléments inconnus.
L’avocat interviendra seulement dans un second temps pour remettre en forme juridique adéquate le mémoire que nous allons bâtir ensemble et rédiger la requête aux fins de la déposer devant la Commission de révision.
La déshérence de la défense
Et M. Massé témoigne aujourd’hui d’avoir perçu l’audience se déliter et d’avoir eu cette affreuse impression que sa défense désertait le procès renvoyé. Au sens propre cette impression lui a traversé l’esprit de ne plus avoir de défense, qu’elle ne rétorquait à aucun des arguments présentés par l’accusation. Ses avocats n’ont eu de cesse de le rassurer certes : martelant qu’il découvrirait toute leur argumentation lors de la plaidoirie – tandis que les manques de la défense ne se rattrapent jamais au cours d’une plaidoirie –.
Hélas la plaidoirie contiendra la plus grande des maladresses. En effet il n’a pas été évoqué lors de cette session que M. Massé avait mis au point un projet de « cartouches-cadenas » pour empêcher l’utilisation intempestive des armes à feu. Son conseil invoque improprement des « cartouches explosives » sans préciser de quoi il s’agit véritablement, laissant supposer aux jurés que M. Massé est spécialiste des explosifs.
Par ailleurs la question du faux témoignage est masquée aux jurés, on ne fait pas répéter au témoin André Terrier qu’il est le seul selon ses dires à pouvoir confectionner un colis piégé avec l’accusé. L’expert commis par M. Massé qui a démontré dans un rapport que l’écriture qui figure sur le colis n’est pas la sienne est vouée aux gémonies par la partie civile aux fins de l’empêcher de déposer : ni le président, ni les avocats de la défense ne s’interposent.
Le président profite de même de la déshérence de la défense et réussit à glisser une comparaison entre les planches qu’on a trouvées au domicile de l’accusé et celles du colis alors que les expertises ont démontré qu’elles n’ont rien à voir, mais M. Massé est paralysé par l’intimation de ses défenseurs de ne pas répliquer. Eux-mêmes semblent tout autant tétanisés.
Et c’est dans ces conditions qu’il est condamné à 25 ans de prison.
L’appel de l’acquittement signale simplement l’acharnement de l’Institution à obtenir coute que coute une condamnation : est-ce son rôle ?
Le temps si long de cette instruction vaine et sans objet semble avoir eu pour motif d’attendre la modification législative permettant au procureur général de faire appel des acquittements. En effet, au vu de l’état du dossier, l’acquittement de M. Massé par la Cour d’assises de Toulouse ne pouvait que s’imposer.
Comment les jurés – de la même façon que les gendarmes auparavant – pourraient-ils souscrire au mobile supposé produit par l’accusation qu’il aurait perdu la tête et se serait vengé pour 30 000 francs au lieu de saisir une juridiction civile ? M. Massé parvient en outre à démontrer qu’aucun des éléments produits par le juge d’instruction n’a de force probante car il s’agit de comparaisons trop vagues pour avoir valeur de charge.
Il faudra que soit organisé un procès où sont gommés un certain nombre d’éléments par un président-procureur pour obtenir une condamnation.
L’enquête de police et l’instruction
Cependant le juge d’instruction et le Parquet de Toulouse ne l’entendent pas ainsi : les gendarmes sont dessaisis et l’institution judiciaire se tourne vers le Service Régional de Police Judiciaire.
Trois mois après les faits, le domicile de M. Massé est retourné de fond en comble et ce dernier assiste à la furie indescriptible d’une perquisition sans objet. En effet la méthode est absurde : comment les enquêteurs dépêchés par le magistrat instructeur peuvent-ils espérer dénicher ce que les gendarmes n’ont pas réussi à trouver alors qu’ils ont agi avec précision quelques heures seulement après l’attentat ?
Aux investigations des gendarmes ne s’ajoute qu’un seul élément : les policiers demandent à M. Massé s’il possède des batteries autoalimentées et comme ce sont de telles batteries qui alimentent les lampes de plongée qu’il a conçues, il leur indique volontiers leur emplacement car il n’a rien à cacher.
L’on comprend qu’il ne s’agit plus d’un raisonnement éclairé, mais d’une agression violente à son encontre dans l’unique but d’obtenir des aveux. Nous pouvons aujourd’hui faire cette comparaison avec la mésaventure tragique d’Arthur London à Prague en 1951 : « mais avouer quoi ? ». En effet, personne ne corrobore les accusations portées par Mme Hernandez puis son mari et son père. Lire la Suite
Lorsqu’à l’automne de l’année 2013 nous avons appris que l’Assemblée Nationale s’était saisie d’un projet de réforme de la loi sur la révision des condamnations pénales – et sans doute les réclamations de M. Deperrois et de M. Massé auprès de la Cour européenne des droits de l’homme n’y sont pas étrangères – , en tant que membres du Comité de soutien à M. Daniel Massé nous avons pensé qu’il était indispensable que nous rédigions un mémoire à l’attention des rapporteurs de la Mission d’information chargée de déposer des propositions en ce sens.
Et c’est ce que nous avons fait à plusieurs, pour démontrer que la détermination du Comité était intacte et que celle-ci s’accompagnait de réflexions, d’une pensée en perspective et en action afin d’atteindre l’idéal de toute institution judiciaire, qui répare autant qu’elle le peut et s’efforce de ne pas détruire.
De cet idéal, nous en sommes encore tant éloigné…
Ce rapport n’a pas été publié par la Mission. Au vu de ce qu’il contient, le lecteur en comprendra aisément les raisons.
Au bout du compte, après la réforme, les défauts de constitutionnalité de la loi précédente n’ont été corrigés qu’en infime partie – l’absence de tout recours, contraire à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et contraire à la Constitution française notamment demeure – et dans les faits, la réécriture de la loi maquille autrement l’embargo organisé pour empêcher toute révision. Elle semble un bel écho au message délivré par les parlementaires au monde judiciaire : vous pouvez commettre des erreurs et couper court par obstruction à toute révision, mais nous vous prions de bien vouloir faire en sorte que cela ne se sache pas, que cela ne se remarque pas…
Voici le rapport oublié :
Une disposition, censée avoir pour visée de se conformer à une exigence – en vérité parfaitement imaginaire – de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’homme venait violer sans égard le principe constitutionnel de non rétroactivité de la loi pénale, réaffirmé par l’un des protocoles ratifiés par la France de cette même convention…
Voilà qui composait un bien sombre tableau de ce rapiéçage incertain que l’on nomme travail parlementaire, aussi convenait-il que cet aspect attentatoire aux libertés publiques de la loi autorisant l’appel du procureur général des acquittements fût dissimulé autant qu’il se pût.
Par malheur, survint le drame de Quévert… et l’institution judiciaire, prise au piège des contradictions de ses menées réactionnaires, allait bientôt s’enferrer d’elle-même.
Un attentat sans cause, sinon celle de détruire ce qu’il prétend représenter …
Le 19 avril 2000 à dix heures du matin, une jeune femme a perdu la vie dans une bourgade du Morbihan qui se dénomme Quévert.
Une fois l’entaille portée dans la proposition de loi, la disposition qu’il fût possible au procureur général de faire appel des acquittements allait prospérer en ce paradoxe qu’il fallait à tout prix se garder de l’erreur judiciaire – feignant de croire qu’un acquittement pu en faire partie. Lire la Suite
Il est aisé de concevoir qu’accorder au Procureur général le droit de faire appel d’un acquittement ne peut qu’accroître fortement la survenue d’erreurs judiciaires, en ceci que le jugement des Cours d’assises est un couperet, qu’il est dépourvu des motifs qui le justifient (1).
Acquitter un homme accusé d’un crime survient lorsque son innocence se reconnaît dans sa plénitude, et tout au moins par l’incertitude du doute raisonnable qui devrait lui profiter par un principe constitutionnel évanescent.
Une seconde procédure n’a de sens véritable que si les charges ont pris meilleure consistance à l’aune de faits nouveaux survenus entretemps, d’éléments nouvellement révélés par une enquête additionnelle. Autrement, la même incertitude ne manque pas de persister, empoisonnée d’une semblable manière, et l’on ne perçoit pas en quoi une seconde sentence tout aussi peu motivée que la première pourrait pallier à ce qui faisait défaut à l’accusation pour emporter condamnation.
De la sorte, il était d’une grande évidence que ceux qui souhaitaient instituer par un appel la remise en cause d’un acquittement songeaient à tirer parti de la connaissance du premier procès pour emporter la conviction du jury lors de l’audience d’appel par un double phénomène, celui d’arranger les débats de telle sorte que la culpabilité semblât cette fois irréfutable ou bien que le doute puisse s’épuiser au gré du mélange des arguments.
La disposition issue de l’article 368 qui ne permettait pas à l’institution judiciaire de faire appel des arrêts d’acquittements incommodait à nul doute la haute hiérarchie car il suffisait d’un jury sensible pour que l’affaire échappât au contrôle de la cour de cassation et qu’elle fût hors d’atteinte du parquet, ce qui ouvrait alors – sainte épouvante – une indépendance nouvelle des présidents de Cour.
Comment l’institution judiciaire imposa le raisonnement par l’absurde et conduisit le gouvernement socialiste, sous la pression des droites, à laisser introduire par amendement la première disposition rétroactive depuis le régime de Vichy…
Il convenait cependant de pouvoir s’appuyer sur le meilleur prétexte qui vienne à justifier un tel recul du droit ; la loi sur l’appel n’était pas encore entrée en application qu’une occasion parut sous la forme idéale d’un procès où s’invoquait l’esprit du roi Salomon, celui des parents de Lubin Duchemin. Lire la Suite
Lorsque la petite fille de M. Massé s’endort dans son berceau près de la mer à Gruissan, elle ne sait pas que son enfance prochaine se conçoit en ce haut lieu des couloirs du parlement, des cabinets ministériels, des chambres sublimes de la Cour de cassation.
Elle ne sait pas que l’on vient de décider pour elle dans le velours et les ors qu’elle ne connaîtrait désormais son père autrement qu’entre les murs de la prison de Muret sous le regard minutieux des conseillers de probation, ou menotté dans le cabinet du juge des affaires familiales afin de mieux l’humilier à ses yeux. Qu’il fût innocent n’importe pas.
Elle ne sait pas encore comprendre que bientôt son père ne viendra plus le soir auprès d’elle au moment de s’endormir comme s’inclinent ces élus de tous bords et ces grands commis de l’État envers leur progéniture.
Elle ne sait pas qu’elle sera vouée à grandir seule avec sa mère, parée comme Gavroche des stigmates de la civilisation, bravant la désespérance, la maladresse des familles d’accueil quand le fardeau devient trop lourd…
Elle ne sait pas encore comment se conçoivent les lois rétroactives en ce beau pays de France et comment l’hypocrite violation de notre constitution et des droits de l’homme semble à les entendre une émanation de la vertu.
Au nom Daniel Massé, la recherche « google » répondait par un certain nombre d’articles que les journaux déposent sur leurs sites en archives ; la page de résultats en recensait une dizaine que publiaient à ce propos la Dépêche du midi ou bien le Nouvel observateur, cependant il était apparu l’existence d’un site dont l’adresse s’intitulait www.presume-coupable.com.
Ainsi, bien mieux qu’un quelconque résumé de quelques lignes par lequel un journaliste travestissait de son point de vue la réalité judiciaire, s’y dévoilait dans toute sa brutalité ce qu’il en était de la terrible victoire du procureur Marc Gaubert.
Le site était façonné avec un soin particulier et je découvrais alors qu’au moins l’un de ses enfants avait pris sur lui de présenter ce qui pouvait brutalement se pressentir, une erreur judiciaire de grande ampleur.
Le soir venu, il advenait parfois le souvenir de Jean-Marc Deperrois, ce qui était sa volonté farouche, sa cause et son combat momentanément perdus…
Comment avais-je pu échouer, sinon méconnaître qu’une vérité parfois cruelle, emprise par l’habitude, les coutumes, ou bien les idées reçues, à l’opposé d’une illusion, ne saurait se délier ?
Je me souvenais de ces voyages en train jusqu’au Val-de-Reuil, cette cité du futur perdue au milieu des champs comme les imaginait George Orwell ou comme il doit s’en trouver de plus grises en Corée du Nord, et la prison faite de béton vieilli et de peinture bleue, de l’autre côté de la voie de chemin de fer, bordée d’étangs acidifiés par les effluves des polluants.