Les avocats n’ont pour rôle de défendre leur client que pour autant il n’entrave de nulle façon l’enclenchement sans heurts des rouages de l’appareil judiciaire, ce qui suppose que la défense ne s’aventurât jamais à remettre en cause les irrégularités de la procédure quand elle atteint la ferveur d’apparence de l’action des juges et des officiers de police judiciaire et mettrait en lumière quelques entorses avec la vérité.
La règle coutumière donne ainsi vertu aux juges et aux enquêteurs de pouvoir s’affranchir aussi grossièrement qu’il est possible du respect des règles et des droits de l’homme sans qu’ils ne soient jamais inquiétés, et surtout jamais par la défense ou bien s’agit-il d’un pur théâtre qui se résoudra dans le labyrinthe des recours et des refus d’informer.
L’institution judiciaire française possède deux caractéristiques immuables qu’elle hérite sans doute de l’ancien régime, elle est obéissante et totalitaire d’essence – le contradictoire est corseté à ses plus beaux artifices -, autrement dit despotique voire même dictatoriale et ne supporte jamais de se remettre en cause.
Il était dans les attributions de ses avocats de demander l’annulation du second interrogatoire de Christian Ranucci devant le juge d’instruction et de ce qui s’en ensuivait, puisque Mlle Di Marino s’était abstenue de lui demander s’il souhaitait l’assistance d’un conseil – après tout, il ne risquait que d’avoir la tête tranchée… Cette demande, ils ne l’ont jamais introduite – fallait-il qu’ils soient distraits, ou bien inaptes.
Mieux encore ils ont accepté que le juge d’instruction fasse inscrire en leur présence, lors de la première confrontation, cette mention pour le moins surprenante et sans valeur – dictée par un futur Conseiller à la Cour de cassation – où l’on invite Christian Ranucci à renoncer à ses droits et accepter les irrégularités de procédure qu’aucune urgence ne saurait justifier :
« Je renonce expressément à me prévaloir de la nullité qui pourrait résulter du fait que Monsieur le Bâtonnier CHIAPPE que je viens de désigner à l’instant comme conseil et Me LEFORSONNEY dont vous avez eu connaissance de la désignation aujourd’hui seulement, n’ont pas été convoqués 48 heures à l’avance et du fait que la procédure n’a pas été mise à leur disposition 24 heures à l’avance.
Je renonce expressément à me prévaloir de cette nullité en présence de Mr le Bâtonnier CHIAPPE et de Me LEFORSONNEY.«