39 Naissance d’une loi rétroactive … Codicille : le mille-feuille ou comment relever l’impéritie du Parlement (Chapitre V – fin).

Une disposition, censée avoir pour visée de se conformer à une exigenceen vérité parfaitement imaginaire – de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’homme venait violer sans égard le principe constitutionnel de non rétroactivité de la loi pénale, réaffirmé par l’un des protocoles ratifiés par la France de cette même convention…

Voilà qui composait un bien sombre tableau de ce rapiéçage incertain que l’on nomme travail parlementaire, aussi convenait-il que cet aspect attentatoire aux libertés publiques de la loi autorisant l’appel du procureur général des acquittements fût dissimulé autant qu’il se pût.

Par malheur, survint le drame de Quévert… et l’institution judiciaire, prise au piège des contradictions de ses menées réactionnaires, allait bientôt s’enferrer d’elle-même.

Un attentat sans cause, sinon celle de détruire ce qu’il prétend représenter …

Le 19 avril 2000 à dix heures du matin, une jeune femme a perdu la vie dans une bourgade du Morbihan qui se dénomme Quévert.

Lire la Suite

37 Orner d’apparente vertu l’erreur judiciaire… Naissance d’une loi rétroactive (Chapitre III Suite)

Il est aisé de concevoir qu’accorder au Procureur général le droit de faire appel d’un acquittement ne peut qu’accroître fortement la survenue d’erreurs judiciaires, en ceci que le jugement des Cours d’assises est un couperet, qu’il est dépourvu des motifs qui le justifient (1).

Acquitter un homme accusé d’un crime survient lorsque son innocence se reconnaît dans sa plénitude, et tout au moins par l’incertitude du doute raisonnable qui devrait lui profiter par un principe constitutionnel évanescent.

Une seconde procédure n’a de sens véritable que si les charges ont pris meilleure consistance à l’aune de faits nouveaux survenus entretemps, d’éléments nouvellement révélés par une enquête additionnelle. Autrement, la même incertitude ne manque pas de persister, empoisonnée d’une semblable manière, et l’on ne perçoit pas en quoi une seconde sentence tout aussi peu motivée que la première pourrait pallier à ce qui faisait défaut à l’accusation pour emporter condamnation.

De la sorte, il était d’une grande évidence que ceux qui souhaitaient instituer par un appel la remise en cause d’un acquittement songeaient à tirer parti de la connaissance du premier procès pour emporter la conviction du jury  lors de l’audience d’appel par un double phénomène, celui d’arranger les débats de telle sorte que la culpabilité semblât cette fois irréfutable ou bien que le doute puisse s’épuiser au gré du mélange des arguments.

Lire la Suite

36 Une manière d’instrumenter les procès… Naissance d’une loi rétroactive (Chapitre II suite)

 

La disposition issue de l’article 368 qui ne permettait pas à l’institution judiciaire de faire appel des arrêts d’acquittements incommodait à nul doute la haute hiérarchie car il suffisait d’un jury sensible pour que l’affaire échappât au contrôle de la cour de cassation et qu’elle fût hors d’atteinte du parquet, ce qui ouvrait alors – sainte épouvante – une indépendance nouvelle des présidents de Cour.

 

 

Comment l’institution judiciaire imposa le raisonnement par l’absurde et conduisit le gouvernement socialiste, sous la pression des droites, à laisser introduire par amendement la première disposition rétroactive depuis le régime de Vichy…

Il convenait cependant de pouvoir s’appuyer sur le meilleur prétexte qui vienne à justifier un tel recul du droit ; la loi sur l’appel n’était pas encore entrée en application qu’une occasion parut sous la forme idéale d’un procès  où s’invoquait l’esprit du roi Salomon, celui des parents de Lubin Duchemin. Lire la Suite

35 La République de l’orgueil. Naissance d’une loi rétroactive (Chapitre I)

Lorsque la petite fille de M. Massé s’endort dans son berceau près de la mer à Gruissan, elle ne sait pas que son enfance prochaine se conçoit en ce haut lieu des couloirs du parlement, des cabinets ministériels, des chambres sublimes de la Cour de cassation.

Elle ne sait pas que l’on vient de décider pour elle dans le velours et les ors qu’elle ne connaîtrait désormais son père autrement qu’entre les murs de la prison de Muret sous le regard minutieux des conseillers de probation, ou menotté dans le cabinet du juge des affaires familiales afin de mieux l’humilier à ses yeux. Qu’il fût innocent n’importe pas.

Elle ne sait pas encore comprendre que bientôt son père ne viendra plus le soir auprès d’elle au moment de s’endormir comme s’inclinent ces élus de tous bords et ces grands commis de l’État envers leur progéniture.

Elle ne sait pas qu’elle sera vouée à grandir seule avec sa mère, parée comme Gavroche des stigmates de la civilisation, bravant la désespérance, la maladresse des familles d’accueil quand le fardeau devient trop lourd…

Elle ne sait pas encore comment se conçoivent les lois rétroactives en ce beau pays de France et comment l’hypocrite violation de notre constitution et des droits de l’homme semble à les entendre une émanation de la vertu.

Lire la Suite

34 La République autoritaire, promesse de notre nuit prochaine…

 

Au nom Daniel Massé, la recherche « google » répondait par un certain nombre d’articles que les journaux déposent sur leurs sites en archives ; la page de résultats en recensait une dizaine que publiaient à ce propos la Dépêche du midi ou bien le Nouvel observateur, cependant il était apparu l’existence d’un site dont l’adresse s’intitulait www.presume-coupable.com.

Ainsi, bien mieux qu’un quelconque résumé de quelques lignes par lequel un journaliste travestissait de son point de vue la réalité judiciaire, s’y dévoilait dans toute sa brutalité ce qu’il en était de la terrible victoire du procureur Marc Gaubert.

Le site était façonné avec un soin particulier et je découvrais alors qu’au moins l’un de ses enfants avait pris sur lui de présenter ce qui pouvait brutalement se pressentir, une erreur judiciaire de grande ampleur.

 

Lire la Suite

33 En cette nuit de l’année 2006…

Le soir venu, il advenait parfois le souvenir de Jean-Marc Deperrois, ce qui était sa volonté farouche, sa cause et son combat momentanément perdus…

Comment avais-je pu échouer, sinon méconnaître qu’une vérité parfois cruelle, emprise par l’habitude, les coutumes, ou bien les idées reçues, à l’opposé d’une illusion, ne saurait se délier ?

Je me souvenais de ces voyages en train jusqu’au Val-de-Reuil, cette cité du futur perdue au milieu des champs comme les imaginait George Orwell ou comme il doit s’en trouver de plus grises en Corée du Nord, et la prison faite de béton vieilli et de peinture bleue, de l’autre côté de la voie de chemin de fer, bordée d’étangs acidifiés par les effluves des polluants.

Lire la Suite

32 La vérité apparue de cet empressement même…

Tandis que Christian Ranucci se trouve en garde-à-vue à Marseille, le 6 juin 1974 au matin, les trois policiers venus perquisitionner à dix heures et demi le logement niçois de Mme Mathon, lui délivrent une injonction inattendue  et la prient de bien vouloir les suivre jusqu’à l’Évêché car, affirment-ils, sa présence est requise. Mme Mathon accroche un mot sur la porte de son appartement afin d’avertir de son absence impromptue les parents des enfants qu’elle garde. Elle prend volontiers la route attachée à cette ferveur qu’elle y voit l’aubaine de pouvoir se rapprocher de son fils…

Quelle raison la police avait-elle de faire venir si vite Héloïse Mathon ? Pour quel motif inavoué faisait-elle preuve d’une si grande précipitation ? Tandis qu’à 17 heures l’accusé vient d’avouer tant de choses et l’endroit où il aurait caché l’arme du crime, l’on va entreprendre de la faire rechercher par les gendarmes en dehors de sa présence.

À cet instant même le Commissaire Alessandra prend soin de recevoir sa mère avec une grande sollicitude. Il lui permet de voir son fils – ecce Mater tua, ecce Filius tuus – le temps de quelques secondes ; il ne faudrait pas que le jeune homme en parlant librement avec elle retrouve l’esprit. Elle est saisie par son œil qui saigne, que n’apercevra pas le Docteur François Vuillet sans doute beaucoup moins attentionné, saisie par ce regard halluciné, comme si son enfant venait de rejoindre un sombre lointain où l’on dérive par le mélange des images et des pensées.

Lire la Suite

31 Exécuter un homme pour avoir méconnu l’existence d’un faux en écriture, cependant que l’Institution judiciaire n’y voit rien à redire, sur quoi elle fonde après tout sa propre barbarie

Que vaudrait une preuve matérielle si elle se détachait de son propre contexte, si l’on tentait de la faire apparaître comme une immanence survenue sans aucune autre origine que l’accusation qu’elle supporte ? Personne en réalité n’avait jamais vu Christian Ranucci en possession d’un couteau à cran d’arrêt, et cette arme ressemblait bien peu à ce jeune homme timide et posé. Lorsqu’il était appelé du contingent, et qu’il résidait en Allemagne, on achetait des couteaux Opinel pour subvenir à sa propre survie lors des bivouacs, lors des campagnes, non pas cette arme à ouverture automatique.

Et quel entêtement, pouvait-on contempler il y a quelques années, de ceux qui s’obstinaient à masquer l’erreur judiciaire venue s’interposer de nos jours à notre esprit dans toute sa cruauté, maintenant que la peine de mort n’a plus droit de paraître dans le code pénal. On rechercha d’anciens appelés, pour tenter de leur arracher un souvenir qui aurait pu laisser croire que ce couteau était depuis longtemps en sa possession, des paroles de gardiens de prison dont on oubliait de citer les noms, de sorte que l’on ne pouvait véritablement savoir s’il s’agissait de rêveries, ou de la déformation d’une réalité. Lire la Suite

30 L’arme du crime dissimulée une seconde fois le 6 juin ? ou la preuve controuvée… (fin)

Lors de la reconstitution conduite par le juge d’instruction, celle-ci situe l’emplacement du couteau au Nord-Ouest, tandis que les gendarmes l’ont trouvé au Nord-Est, ce qui démontre que Christian Ranucci n’a jamais su où cette arme était cachée en vérité…

Le procès-verbal qui rend compte de la reconstitution effectuée par Mme Di Marino le 24 juin 1974 énonce que Christian Ranucci aurait indiqué l’endroit où il s’était débarrassé du couteau :

« Nous nous sommes enfin rendus à la champignonnière. Ranucci a reconnu l’endroit situé à quelques mètres de l’entrée de cette champignonnière où il avait enfoui le couteau, arme du crime, dans un tas de fumier.« 

Le juge d’instruction, tandis que l’inculpé risque la peine capitale, ne s’embarrasse pas de précisions inutiles, cependant qu’il eût été préférable que Christian Ranucci indiquât l’endroit avant que le couteau ne fût déterré. Il semble que cela s’avérait si simple, à lire le compte rendu de la reconstitution…

Après coup, la force probante d’une telle reconnaissance s’en trouve profondément amoindrie et sa valeur anéantie. Cependant, l’indication n’est pas seulement imprécise, elle est entachée d’erreur… L’endroit où le rapport technique établi par la gendarmerie situe le lieu de sa découverte se trouve à une bonne cinquantaine de mètres de l’entrée du tunnel, non pas à « quelques mètres ». L’incohérence entre le point indiqué, même vaguement, par Christian Ranucci « à quelques mètres de l’entrée du tunnel » et le point déterminé par les gendarmes – or donc 50 mètres plus loin –  est bien trop flagrante pour ne pas être significative.

Ce qui laisse apercevoir que l’on s’est contenté de poser une question vague à Christian Ranucci et qu’il n’a rien reconnu de précis et de fait l’on peut en déduire qu’il ne connaissait en aucun cas l’endroit où les gendarmes avaient trouvé l’arme du crime. Plus encore, il semble que le juge d’instruction non plus n’ait pas lu le dossier et ne se soit pas rendu compte de la méprise. Lire la Suite

29 L’arme du crime trouvée le 5 juin et cachée de nouveau le lendemain ? ou la preuve controuvée… (suite)

Le 6 juin dans la matinée, les policiers sont entrés en possession de 5 scellés, dont le pull rouge, plus tard sans doute des deux moulages de roues. Et lorsqu’ils ont donné à essayer ce vêtement à Christian Ranucci, ils se sont aperçu qu’il n’était pas à sa taille et ne lui appartenait pas. Ce qu’ils ont entériné comme un fait établi.

Invoquons l’espace d’un instant cette hypothèse au prime abord inconcevable, que le couteau à cran d’arrêt, trouvé dans la tourbe amassée à l’entrée du tunnel ait été en leur possession et qu’il soit venu à leur réflexion l’intention de le présenter à Christian Ranucci. Celui-ci avait beau jeu de dire que le couteau lui était inconnu, tout comme le pull. Lire la Suite

28 L’arme du crime cachée une seconde fois aux fins de persuader qu’elle appartient à Christian Ranucci ? ou la preuve controuvée…

Sur les indications de M. Alain Aubert, de M. Vincent Martinez, de M. Mohammed Rahou et de M. Henri Guazzone, par lesquels ils suggèrent que l’accident survenu au carrefour de la Pomme et l’épisode du coupé Peugeot enlisé dans la galerie de la champignonnière pourraient avoir un lien avec l’enlèvement de Marie-Dolorès la veille, le 4 juin au soir la brigade de Gréasque dépêche une estafette et quatre gendarmes parcourent les lieux sans rien remarquer.

À cet instant, il apparaît que le modèle de la voiture ne correspond pas : on recherche une Simca 1100, pas un coupé Peugeot 304,  et cet événement appuie que ni Alain Aubert, ni Vincent Martinez n’ont évoqué la présence d’un enfant, sinon aurait-on réagi avec une autre vigueur et bien plus de précipitation.

Le lendemain dans la matinée, M. Martinez rappelle la gendarmerie pour signaler par acquis de conscience qu’une enfant aurait pu se trouver à bord du coupé Peugeot… L’on joint alors M. Aubert à midi qui veut bien confirmer que l’homme qu’il a aperçu l’espace d’une seconde s’éloigner du coupé Peugeot transportait un paquet assez volumineux, précisant qu’une fois dissimulé dans les buissons, il n’a pas répondu à ses appels,  et lui fait-on préciser l’endroit où il a surpris le véhicule arrêté.

  Lire la Suite

27 Ce qu’il en est de l’accusation portée envers Christian Ranucci… ou comment les incohérences disparaissent aux yeux des jurés

À contempler la photographie qui rend compte du rituel de la reconnaissance, lorsque Christian fut aligné et mélangé aux enquêteurs, il avait été décidé pour cette épreuve qu’il ne porterait pas de lunettes et c’est ainsi qu’il figure au milieu des inspecteurs pour qu’il en soit témoigné.

Or la myopie de Christian Ranucci nécessite une correction de 3 dioptries. Au-delà d’un tiers de mètre, il n’y voit plus, tout lui apparaît flou et nul ne l’a jamais aperçu sans ses lunettes : il ne saurait s’en passer dans toutes les circonstances et les usages de la vie.

Cependant, il apparaît bien que le ravisseur ne portait pas de lunettes et c’est pour cette raison sans doute que l’on a pris cette décision de présenter celui que l’on considérait comme suspect dans une apparence que nul ne lui connaissait, hormis ses plus proches  intimes…

Voilà donc l’accusation confrontée à cette multitude de détails incompatibles, de toutes ces circonstances qui ne conviennent plus l’une avec l’autre. Lire la Suite

26 Aveux sans aucune cohérence par quoi sans savoir Christian Ranucci pose sa tête sous le couteau de la guillotine (fin)

 

Ce dont ne rendent nul compte les aveux passés par Christian Ranucci, c’est la violence de cet enlèvement, et la longueur infinie du périple qui mène de la Cité Sainte-Agnès à Marseille jusqu’aux hauteurs de Peypin et au carrefour de la Pomme.

Ainsi, les enquêteurs prétendent ignorer le trouble et la terreur qui ont pu s’emparer de l’enfant et dont le signe fut qu’elle se soit recroquevillée sur elle-même tout au long du trajet, durant une demi-heure, ce qui demeure la seule image concevable.

Lire la Suite

23 Yvan Colonna ou comment ne chercher la vérité qu’à cet endroit où l’on est sûr de ne jamais la trouver

 

Il est dit et repris dans toutes les dépêches d’agence que la décision de la Cour de cassation d’annuler le procès d’appel qui condamna Yvan Colonna découlerait d’un « vice de forme ». Cela, c’est la Cour de cassation qui semble le distiller avec envie.

Cependant, l’on oublie de mentionner que la loi autorise curieusement ladite Cour à ne pas examiner l’ensemble des arguments produits par le demandeur, il suffit au juge de dénicher un moyen de cassation pour qu’il puisse s’autoriser à ne pas répondre ni motiver la validité des autres. Lire la Suite

22 Aline et Alain Aubert pris au piège dans l’engrenage de l’ambiguïté et de la mort

Le 6 juin 1974 en début d’après-midi, après 19 heures de garde-à-vue sans dormir, Christian Ranucci accepte de passer des aveux et de se laisser conduire à la mort.
Il vient d’être confronté à ces deux êtres, Aline et Alain Aubert – qui se sont lancés à sa poursuite à la demande de Vincent Martinez, le conducteur du véhicule que le jeune homme avait malencontreusement embouti pour ne pas avoir respecté l’arrêt et la priorité au croisement.

Lorsqu’elles sont confrontées à ce presque enfant terrassé de fatigue, elles affirment de façon péremptoire le reconnaître et l’avoir vu tirer de sa voiture une enfant et l’emporter dans les fourrés.

Il est midi et demi le 3 juin lorsque Christian Ranucci s’avance sans marquer le signal stop tandis que survient sur sa gauche la voiture de Vincent Martinez. L’accrochage est d’une telle violence que le véhicule s’immobilise sur la chaussée.  Alain Aubert s’arrête quelques instant plus tard pour porter assistance au malheureux accidenté, le coupé Peugeot a disparu et M. Aubert s’empresse de s’engager à la poursuite du fuyard. Il reviendra quelques instants plus tard communiquer le numéro minéralogique du conducteur indélicat.

L’aile est enfoncée au point que M. Martinez se voit contraint de sonner au pavillon voisin pour emprunter des outils et l’arracher. Il repartira dix minutes plus tard pour  se rendre peu après à la gendarmerie de Gréasque afin de porter plainte. Lire la Suite

21 Les policiers font parfois de bien médiocres romanciers (suite)

 

La garde-à-vue est un instrument inutile, le résidus des méthodes de l’ancienne justice où l’on passait l’accusé par les fers et les tourments pour faire jaillir la parole des ténèbres de l’esprit.

Au bout de quelques heures, sans doute peut-on commencer à profiter de la fatigue de Christian Ranucci. Lorsqu’il sera harassé, pourra-t-on écrire ce que l’on veut et recueillir son consentement, même au mensonge, même à l’inexactitude des faits, mieux même à l’imprécision, à l’approximation, plus encore à l’invention. Lire la Suite

20 Les policiers font parfois de bien médiocres romanciers…

 

Lors du procès de Christian Ranucci, les observateurs se souviennent d’une sensation de brouillard tandis qu’on interrogeait l’accusé qui ne se conformait pas à l’image qu’on donnait de lui et tout vint à s’éclaircir à l’instant où le président Antona se mit à lire les aveux que le jeune homme avait contresignés le 6 avril 1974.

Il se révélait de façon splendide une vérité indépassable ayant l’éclat de l’évidence. Et c’est pourquoi il importe de comprendre comment ces aveux furent élaborés et comment ils affrontent la réalité de ce que renferment les témoignages que nous possédons par ailleurs ; tenter de percevoir la résonance des paroles que les enquêteurs ont bien voulu retracer, les silences aussi qui entourent leurs écrits – car c’est bien aux enquêteurs qu’il revient de façonner le texte des aveux à la convenance des questions qu’ils posent… Lire la Suite

18 Journalistes au Monde ? au Figaro ? ou bien pauvres janissaires de la Cour de cassation

La Cour de cassation a repris peu à peu les prérogatives des Parlements d’ancien régime, elle ne s’adresse au Roi qu’à volées de remontrances et lui tient tête avec morgue et animadversion. Il n’est plus une loi désormais qui ne puisse s’élaborer sans recevoir l’avis éclairé de son Président et son assentiment secret, pas une réforme sur laquelle elle n’appose son veto.

Le cœur de tout Empire se trouve ici, car pour la République française il n’est qu’une seule Cour de cassation. Lire la Suite

17 Un pas vers la nuit

Lorsque Christian Ranucci se réveille, il est sans doute 17 heures. Il se trouve au beau milieu d’un tunnel humide et frais, dans un tout autre univers. Il ne sait pas combien de temps a duré son inconscience, un abîme insondable le sépare désormais de l’accident, de sa nuit blanche, de sa matinée houleuse en compagnie de son père Jean Ranucci et de sa belle-mère.

Quelque chose le surprend à peine, il se trouve allongé sur la banquette arrière de sa propre voiture, et c’est ce qu’il indiquera plus tard à Maître Le Forsonney lorsqu’il sera emmuré au fond de sa prison. Il se réveille transporté à cet endroit sans pouvoir en comprendre la cause. Lire la Suite